4) La deuxième partie du trajet

Messages : 42 Date d'inscription : 05/07/2013

Elle avait voulu son avis... elle l'a. Will ne se gêna pas pour lui faire gentiment comprendre que rien de ce qu'elle ferait ne servirait à quelque chose, et que pire, cela pourrait se retourner contre eux. Tout le long de son explication, le corps de Tamy se tassa lentement pour finir sans un bruit tout au fond de son siège, la tête enfoncée dans son cou. Jess et Matt avaient beau lui trouver des raisons d'appeler la police, elle devait bien admettre que Will n'avait pas tort au final. La blonde posa la tablette sur le siège d’à coté et avait vraisemblablement perdu de sa verve:

-Ouais... peut être pas une bonne idée l'appel anonyme...

Instinctivement et de manière tout à fait contradictoire, elle fouilla dans son sac pour vérifier si son portable captait ou pas. Puis Matt évoqua une nouvelle théorie: le shérif pourrait-il être dans le coup? Pas con, et si c’était vraiment le cas, l'appel serait une véritable connerie. Ça expliquerait aussi pourquoi il n'a pas beaucoup cherché la fille dans la station service et qu'il l'ait vite accusé d’être shootée. Tamy fronça les sourcils et se frotta le menton comme une inspectrice en plein film. Merde... ça complique tout du coup.

-Quelle meilleure couverture que celle d'un shérif. On l'a dans l'cul quoi...

Et pourtant, si on était attentif, rien n’était moins sûr dans l'air de Tamy qu'elle se décide vraiment à laisser tomber son idée. Après tout, c’était vers elle qu’était venue la disparue... c’était elle qui devrait vivre avec l'intention de ne rien faire.

Les sujets et les gens... En même temps, elle ne peut que le comprendre, le Eddy. Entre les discussions sur le cul et celles sur les morts et autres fantômes, ça n'est pas des plus intéressant... Quoique les fantômes peuvent être sympas à aborder, dans les débats. Quant à la nausée... C'est plutôt les odeurs de chacun mélangées dans l'habitacle qui lui colleraient des nausées, à elle.

- Et quels sujets aimez vous aborder ?

Lui demande-t-elle juste avant l'intervention d'Alison auprès d'elle et le résultat du tirage. Elle ne peut qu'acquiescer, Proust, c'est juste de l'ennui en bloc, vendu à la tonne... Mais on ne lit pas toujours ce qu'on souhaite lire, affiner sa culture, ça n'est pas donné à tout le monde. Hemingway, oui, elle connait, elle a dû lire environ toute sa prose, en français comme en version anglaise. Sûr qu'elle a aimé, oui. Puis ses yeux se posent sur ses mains, vides. Alison la surveillerait donc pour lui parler de son livre une fois qu'il est rangé ? Étrange... Elle la tiendra donc à l'oeil également. Pas difficile, de l'observer, pour le moment...

La rousse se dirige vers Thomas, lui cause et...
Patatras.
Ambiance qui chute encore d'un cran. Déjà que ça n'était pas vraiment la joie avant, alors là, avec l'évocation de sa soeur...
La bourgeoise soupire. Pas tant pour le fait qu'Alison n'admette pas le fait de s'amuser, mais surtout par l'annulation pure et simple du bizutage. Pour avoir déjà connu ce genre de trucs, vu et subi, elle sait que même la victime peut apprécier... Si tout est fait dans les règles. Toujours à la limite, border line...

- On est là pour s'amuser ou pour veiller les morts ?

Question balancée comme ça, à Eddie, pourquoi pas. Pour elle même sans doute, mais puisqu'elle a un voisin... Elle a décidé de jouer le jeu, ce soir, voir si les soirées américaines peuvent valoir celles qu'elle fait avec ses amis...

Admin Messages : 184 Date d'inscription : 05/07/2013

4) La deuxième partie du trajet - Page 2 0wood210

Au début à regarder par la vitre du bus, Eddy se retourne pour fixer Marie-Elisabeth dans les yeux à sa question.

Eddy: - Je sais que nous avons pas élevé les cochons ensemble Miss du Guesclain mais notre statut d'étudiant réciproque, notre jeune age et notre week end organisé sous l'étiquette de "vacances" peuvent nous permettre de se tutoyer. N'est ce pas ?
On pourrait aborder le sujet de la beauté. Si ça se trouve trop ennuyeux, on peut se lancer dans un sujet plus... léger. A ta guise.

Il se retourne plusieurs fois pour voir ou en est sa tablette. Il semble soucieux. Il reprend d'un air plus détendu.

Eddy: - Veiller les morts...
Quels morts ?
Elle martyrisait à plaisir ma mémoire
C’était au beau milieu de notre tragédie
Le monde ressemblait à ce miroir maudit
Le peigne partageait les feux de cette moire
Et ces feux éclairaient des coins de ma mémoire

Avait-il soufflé en murmurant.

Se tutoyer ? En anglais, ça ne changeait pas grand chose... Si ce n'était le ton utilisé. Tenter de lui parler de "moins haut", difficile, quand le piédestal sur lequel on se place est si élevé... Elle acquiesce cependant, elle a décidé de se mettre à portée de main, pour ce week end, elle est bien bonne pour ces petites gens.

Quels morts ? La frangine... d'autres, peut être ? Enfin, là n'est pas le thème de la soirée, du moins elle l'espère. Stupeur sans tremblement, quand elle l'entend déclamer quelques vers. Sourire, franc, celui ci. Du Louis Aragon, traduit, correctement qui plus est, avec le luxe de rimes qui se tenaient.
Fugace, l'idée que le poème puisse-t-être dit en l'honneur de Marion la traverse... Trop vive pour être réellement saisie, l'idée.

- Aragon, hmmm ? C'est meilleur en Français, mais tu t'en sors bien.
C’était un beau milieu de notre tragédie
Comme dans la semaine est assis le jeudi
Et pendant un long jour assise à sa mémoire
Elle voyait au loin mourir dans son miroir
Un à un les acteurs de notre tragédie
Et qui sont les meilleurs de ce monde maudit

Elle déclame la suite, dans un anglais relativement correct... Un peu hésitant puisqu'elle doit réfléchir à la traduction, et non pas simplement s'exprimer dans cette langue qui lui est devenue naturelle.

- Une raison pour avoir choisi ce poème là ?

Admin Messages : 184 Date d'inscription : 05/07/2013

Un petit sourire se dessine sur le visage presque juvénile d'Eddy. Il semble aussi gêné que ravi. Nouveau regard en arrière... aussi bien pour sa tablette qu'Alison, il reprend la parole avec une petite voix fluette.

Eddy: - Raison personnelle. Si je le fais partager on peut l’interpréter de différentes façons. Je suis bien trop insignifiant pour que l'on porte crédit à mes ressentis ou états d'âme.

Il cligne lentement les yeux et tourne aussi lentement son visage vers elle.

Eddy: - Surtout quand on vient de France d'une famille noble. Je ne parlerais pas de l'éducation, du mode de vie ou encore de la différence de sexe qui apporte tout le réconfort rêvé. Quel étrange apprentissage de vivre un an chez les sauvages d’outre-Atlantique.

Cette fois ci avec un léger ton narquois qui ne se voulait pas moqueur.

Pas bien méchante, la pique, mais il pique juste. Elle a une petite moue amusée. Aurait-elle trouvé quelque intérêt à ce week end ? La joute verbale ? Jolie flèche en vérité, et tellement réaliste, au final, quoique...

- Qui cite Aragon et se l'approprie ne peut pas être si insignifiant que cela. Donc cela m'intéresse.

Elle se mordille une lèvre, hésitante, rien qu'un instant, et décide de jouer cartes sur table, à moins que ça ne soit de l'humour. Sourire, toujours... De là à savoir s'il est vrai ou forcé...

- Touché. Les sauvages n'ont jamais été ceux qu'on croyait, mais nous autres Français avions fait la même erreur.
Mais tu peux me parler... J'ai décidé que ce week end serait sous le signe de l'ethnologie. Quoi de mieux que le témoignage d'un sauvage d'outre atlantique pour mon reportage personnel ?

Elle le dévisage franchement, l'air mi sérieux mi amusé. N'a rien loupé de ses mimiques, d'ailleurs.

» Trajet 2 - Emma et Ali en pleine discussion